Ce jeune homme fête ses quatre-vingt étés ce matin.
Paul McCartney ne s'arrêtera jamais. Il fait partie de ceux, il y en a plusieurs de sa génération, qui se réveilleront morts le jour où il arrêtera de rocker et de roller.
Personnage ambivalent car la carapace qu'il s'est construite au fil des décennies ne laisse que rarement voir qui il est vraiment. Et si tout était dans ses chansons ? Tout simplement. Il y parle souvent de maison, du bonheur domestique ou en tout cas d'un retour au domicile, au foyer. Là où tout est chaud et apaisé. Désir et envie nés dans le cœur d'un adolescent qui perdait sa mère à quatorze ans ? Sûrement. Pas seulement. Quand il a cinquante-cinq ans, c'est le même cancer qui lui enlève son amour, son soldat, son roc Linda.
Aujourd'hui, les célébrations de celui qui est toujours debout, là, devant nous, sont amplement méritées. Quelle vie incroyable - quelles magnifiques vies multiples ! On en reparlera un jour, obsédé par la postérité qu'il est et, je le crois aussi, par une sincère envie de créer, Paul McCartney n'a cessé de se trouver là où on ne l'attendait pas. Les aventures et expéditions sonores de Paulo la bidouille mériteraient un jour d'être mises en avant. Au-delà des chansons magnifiques qu'il a pu pondre je veux dire.
Les moments qui me touchent et me parlent sont rares mais forts. Rares mais dans une vie aussi scrutée, filmée et riche que la sienne, je vous rassure, ils sont légion.
Comme ici, en 1999, quand il raconte cette anecdote. Il était déjà le père adoptif de Heather, la fille de Linda. Mais Linda a maintenant accouché de leur premier enfant ensemble, Mary. Après sa naissance, Linda reste à l'hôpital environ une semaine et Paul est là, l'accompagne pour les soins, etc... Il y avait une lithographie de Picasso sur un mur, d'un vieil homme qui jouait de la guitare. Il raconte qu'au bout d'une semaine à la regarder, il s'en rapproche tout près et se dit: "mais au fait, quel accord joue-t-il ce vieil homme ?". Il explique, "je suis guitariste, je suis intéressé, je veux savoir quel accord il fait !". Avec une guitare en mains il continue, "J'ai remarqué qu'il avait juste deux doigts, deux doigts ici. Alors je me suis dit que j'allais essayer et voir quel son ça avait…". Paul gratte alors la guitare: "oh c'est joli…". Il continue d'expliquer, il se sert de cet accord comme point de départ et laisse son inspiration flotter. Il se dit alors qu'il écrirait une chanson qui n'utiliserait que ses deux doigts.
Je trouve que dans cette anecdote il y a tout, en tout cas beaucoup, de McCartney. Le mec qui n'arrête jamais de penser. D'essayer de comprendre, d'improviser. Au final de créer.
Au bout du compte, nous avons quoi ? Ce moment suspendu qui n'a jamais plus été interprété en public ou sur disque et qui est, je trouve, joli. Quand il joue, sur le plateau télé, il est comme en transe. En tout cas habité. Jusqu'à que le control freak en lui reprenne le dessus et abrège.
L'extrait vidéo ci-dessus n'inclut pas l'anecdote elle-même (bien sûr racontée en anglais) qui est pleine d'humour et de tendresse. À voir ici pour les anglophones curieux.
Happy birthday Macca ! Aux quatre-vingt prochaines années de surprises et découvertes. Et chansons.
Je vous laisse avec une photo de lui en 2022. Et une petite perle, la chanson quasi-instrumentale, 222, sortie assez confidentiellement en 2007. C'est un exemple de petit bijou caché.